Art contemporain à Versailles !
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Art contemporain à Versailles !
Xavier Veilhan joue l'architecte roi à Versailles
Valérie Duponchelle
08/09/2009 | Mise à jour : 14:00 | Commentaires 19 | Ajouter à ma sélection
Ce Carrosse furieusement violet, exposé dans la cour d'honneur, mixte les références.
Un an après l'Américain Jeff Koons, c'est au tour du jeune plasticien français d'investir le domaine royal.
Mince dans sa panoplie noire de scooter, discret, pour ne pas dire gardant l'incognito sous ses lunettes de soleil, Xavier Veilhan fait figure de jeune homme sage et téméraire dans le décor immense de Versailles. Ce jeune artiste français qui succède vaillamment à la star américaine Jeff Koons dans ce sanctuaire du patrimoine royal n'a pas comme ce dernier «l'art de la polémique». Mesuré, secret et volontaire, ce Lyonnais bien élevé (pléonasme) revendique en revanche «la fraîcheur des ambitieux» pour ce deuxième acte contemporain au château de Versailles.
En ce lundi doré de septembre, les visiteurs des jardins sont le premier public de son «parcours dans le paysage-territoire de Versailles», défendu avec patriotisme par Laurent Le Bon, tête chercheuse de Beaubourg et commissaire de cette deuxième offensive contemporaine au château. Appareil numérique en main, ils ne s'offusquent pas, commentent peu et se prennent aussitôt en photo dans la perspective des neuf Architectes, statues plus ou moins virtuelles, qui dessinent une ligne sinueuse vers les bassins somptueux.
Frais et poétique
Un an plus tard, les choses ont bien changé. Jeff Koons est passé par là, vedette américaine dont la cote internationale et la renommée sulfureuse ont attisé colère et curiosité. Bonne ou mauvaise, toute publicité est bonne, disent les Américains. Elle a fait encore croître la fréquentation de Versailles (+20 % en novembre 2009 par rapport à 2007) et se multiplier les soirées privées au château qui remplissent les caisses du domaine. Depuis, la crise tant annoncée est arrivée, faisant trembler les organisateurs de ce projet bien français, aussi risqué que la cote de nos artistes à l'étranger, aussi ambitieux que la jeunesse. Du Jet d'eau, copié sur celui de Genève, au Mobile violet flash de l'escalier Gabriel, les œuvres, coûteuses, ont souvent été réalisées pour l'occasion. Elle est unique. Une superbe Light Box de 1 000 ampoules et 1 000 pixels par image trône dans l'escalier de la Reine, voyage en boucle, frais, poétique, d'un nageur hirsute comme Nanni Moretti, des bassins aux grands degrés.
La question du jour n'est plus d'offenser ou non l'ordonnancement privé du roi, mais de vérifier ou non si notre scène artistique est populaire comme l'Amérique. Selon Laurent Brunner, directeur général de Château de Versailles Spectacles, le coût total est de 2 M€, soit 1,40 M€ de frais de production et 600 000 € pour l'installation des œuvres et l'organisation de l'exposition, financé par sa galerie Emmanuel Perrotin, le Cnap et des mécènes aventuriers. Sans toucher aux fonds attribués par l'État pour l'entretien du patrimoine ! Le reste est question de goût, d'âge ou d'envie.
Cour de marbre. Sous le balcon du Roi-Soleil, à l'aplomb des trois fenêtres d'or de la chambre du roi, voici un gros bébé d'aluminium emmailloté dans sa combinaison futuriste, criblée de cratères lunaires. Le Gisant, Youri Gagarine (notre photo) mesure 4,5 m de long, garde sa tête en légère lévitation au-dessus de la mosaïque de marbre noir et blanc, malgré sa masse interstellaire et bizarrement mignonne (400 kg, plus le casque et les éléments démontables, soit un total qui frise les 600 kg). Les fans d'art contemporain reconnaîtront le visage du plasticien français vénéré des artistes, Pierre Huyghe (prix spécial du jury, Biennale de Venise 2001). Les autres s'interrogeront sur le parallèle entre le Grand Siècle et ce héros russe du cosmos politique, déposé comme une offrande enfantine avec son morceau de torse, éclat de rocher facetté, coloré comme un jouet (violet très Swinging London ; c'est aussi «la couleur du deuil royal»), déposé ailleurs comme le corps d'Osiris en Égypte. «Versailles, c'est le lieu de la conquête spatiale par excellence. Gagarine a été le premier à voir la Terre comme un objet, il devient un objet posé à terre. Le roi est mort, vive le roi ! J'aime l'idée que rien ne se perd, tout se transforme», dit l'artiste ébloui de ce contexte royal.
Le parterre d'eau. Les maquettes montrées en juillet dans l'atelier de l'artiste n'étaient pas engageantes. Que faisaient ces neuf architectes sur leurs socles évidés, parfois penchés comme une maison qui tombe ? Difficile de parler d'espace - et Versailles lui donne une dimension féérique qui surprend à chaque fois -, à partir d'un univers normalisé, même design. Ici, le concept de l'artiste revit. Il faut presque s'y prendre à deux fois avant de voir ces géants (notre photo) posés sur une ligne invisible qui suit la marche des visiteurs vers le parterre d'eau. «Naïvement, j'ai fait une liste idéale de noms, confie l'artiste. Puis je me suis lancé dans la bataille pour convaincre ces stars suroccupées de venir poser pour moi, de 45 minutes à 1 heure, sur un plateau tournant, entouré de trois scanners. Lord Norman Foster, Richard Rogers, et leur doyen à tous, Claude Parent, ont accepté. Zaha Hadid a failli accepter. Herzog & De Meuron, Rem Koolhaas, d'une manière générale les protestants, ont refusé de se mettre ainsi «en avant». Le scanner relève une image des points dans l'espace qui sont rassemblés ensuite, comme on recolle un pot cassé. Les statues sont 20 % plus grandes que les tailles réelles, donc Tadao Ando fait 2 m, mais le colosse Jean Nouvel près de 2,25 m. C'est une promenade dans leur ombre tutélaire.»
Cour d'honneur. On l'a tant vu à la une de la presse arts, dévalant les pavés devant la grille d'honneur dans une fulgurance de violet et de formes de synthèse, qu'on l'imaginait plus grand. Mais rien n'est vraiment grand à côté de Versailles, qui accentue par sa majesté le côté jouet de cette commande du Cnap (Centre national des arts plastiques). Elle a lancé le projet de «Veilhan Versailles» (350 000 €). Ce Carrosse furieusement violet mixte les références, de la fuite à Varenne au découpage photographique du mouvement par Marey ou Muybridge, des pixels (littéralement «picture element») passés à la 3e dimension, à l'image furtive de l'écran. «De loin, on le perçoit comme un logotype. Plus on s'approche, plus il se décompose, comme la chair se décompose en cellules sous la peau», dit l'artiste.
Valérie Duponchelle
08/09/2009 | Mise à jour : 14:00 | Commentaires 19 | Ajouter à ma sélection
Ce Carrosse furieusement violet, exposé dans la cour d'honneur, mixte les références.
Un an après l'Américain Jeff Koons, c'est au tour du jeune plasticien français d'investir le domaine royal.
Mince dans sa panoplie noire de scooter, discret, pour ne pas dire gardant l'incognito sous ses lunettes de soleil, Xavier Veilhan fait figure de jeune homme sage et téméraire dans le décor immense de Versailles. Ce jeune artiste français qui succède vaillamment à la star américaine Jeff Koons dans ce sanctuaire du patrimoine royal n'a pas comme ce dernier «l'art de la polémique». Mesuré, secret et volontaire, ce Lyonnais bien élevé (pléonasme) revendique en revanche «la fraîcheur des ambitieux» pour ce deuxième acte contemporain au château de Versailles.
En ce lundi doré de septembre, les visiteurs des jardins sont le premier public de son «parcours dans le paysage-territoire de Versailles», défendu avec patriotisme par Laurent Le Bon, tête chercheuse de Beaubourg et commissaire de cette deuxième offensive contemporaine au château. Appareil numérique en main, ils ne s'offusquent pas, commentent peu et se prennent aussitôt en photo dans la perspective des neuf Architectes, statues plus ou moins virtuelles, qui dessinent une ligne sinueuse vers les bassins somptueux.
Frais et poétique
Un an plus tard, les choses ont bien changé. Jeff Koons est passé par là, vedette américaine dont la cote internationale et la renommée sulfureuse ont attisé colère et curiosité. Bonne ou mauvaise, toute publicité est bonne, disent les Américains. Elle a fait encore croître la fréquentation de Versailles (+20 % en novembre 2009 par rapport à 2007) et se multiplier les soirées privées au château qui remplissent les caisses du domaine. Depuis, la crise tant annoncée est arrivée, faisant trembler les organisateurs de ce projet bien français, aussi risqué que la cote de nos artistes à l'étranger, aussi ambitieux que la jeunesse. Du Jet d'eau, copié sur celui de Genève, au Mobile violet flash de l'escalier Gabriel, les œuvres, coûteuses, ont souvent été réalisées pour l'occasion. Elle est unique. Une superbe Light Box de 1 000 ampoules et 1 000 pixels par image trône dans l'escalier de la Reine, voyage en boucle, frais, poétique, d'un nageur hirsute comme Nanni Moretti, des bassins aux grands degrés.
La question du jour n'est plus d'offenser ou non l'ordonnancement privé du roi, mais de vérifier ou non si notre scène artistique est populaire comme l'Amérique. Selon Laurent Brunner, directeur général de Château de Versailles Spectacles, le coût total est de 2 M€, soit 1,40 M€ de frais de production et 600 000 € pour l'installation des œuvres et l'organisation de l'exposition, financé par sa galerie Emmanuel Perrotin, le Cnap et des mécènes aventuriers. Sans toucher aux fonds attribués par l'État pour l'entretien du patrimoine ! Le reste est question de goût, d'âge ou d'envie.
Cour de marbre. Sous le balcon du Roi-Soleil, à l'aplomb des trois fenêtres d'or de la chambre du roi, voici un gros bébé d'aluminium emmailloté dans sa combinaison futuriste, criblée de cratères lunaires. Le Gisant, Youri Gagarine (notre photo) mesure 4,5 m de long, garde sa tête en légère lévitation au-dessus de la mosaïque de marbre noir et blanc, malgré sa masse interstellaire et bizarrement mignonne (400 kg, plus le casque et les éléments démontables, soit un total qui frise les 600 kg). Les fans d'art contemporain reconnaîtront le visage du plasticien français vénéré des artistes, Pierre Huyghe (prix spécial du jury, Biennale de Venise 2001). Les autres s'interrogeront sur le parallèle entre le Grand Siècle et ce héros russe du cosmos politique, déposé comme une offrande enfantine avec son morceau de torse, éclat de rocher facetté, coloré comme un jouet (violet très Swinging London ; c'est aussi «la couleur du deuil royal»), déposé ailleurs comme le corps d'Osiris en Égypte. «Versailles, c'est le lieu de la conquête spatiale par excellence. Gagarine a été le premier à voir la Terre comme un objet, il devient un objet posé à terre. Le roi est mort, vive le roi ! J'aime l'idée que rien ne se perd, tout se transforme», dit l'artiste ébloui de ce contexte royal.
Le parterre d'eau. Les maquettes montrées en juillet dans l'atelier de l'artiste n'étaient pas engageantes. Que faisaient ces neuf architectes sur leurs socles évidés, parfois penchés comme une maison qui tombe ? Difficile de parler d'espace - et Versailles lui donne une dimension féérique qui surprend à chaque fois -, à partir d'un univers normalisé, même design. Ici, le concept de l'artiste revit. Il faut presque s'y prendre à deux fois avant de voir ces géants (notre photo) posés sur une ligne invisible qui suit la marche des visiteurs vers le parterre d'eau. «Naïvement, j'ai fait une liste idéale de noms, confie l'artiste. Puis je me suis lancé dans la bataille pour convaincre ces stars suroccupées de venir poser pour moi, de 45 minutes à 1 heure, sur un plateau tournant, entouré de trois scanners. Lord Norman Foster, Richard Rogers, et leur doyen à tous, Claude Parent, ont accepté. Zaha Hadid a failli accepter. Herzog & De Meuron, Rem Koolhaas, d'une manière générale les protestants, ont refusé de se mettre ainsi «en avant». Le scanner relève une image des points dans l'espace qui sont rassemblés ensuite, comme on recolle un pot cassé. Les statues sont 20 % plus grandes que les tailles réelles, donc Tadao Ando fait 2 m, mais le colosse Jean Nouvel près de 2,25 m. C'est une promenade dans leur ombre tutélaire.»
Cour d'honneur. On l'a tant vu à la une de la presse arts, dévalant les pavés devant la grille d'honneur dans une fulgurance de violet et de formes de synthèse, qu'on l'imaginait plus grand. Mais rien n'est vraiment grand à côté de Versailles, qui accentue par sa majesté le côté jouet de cette commande du Cnap (Centre national des arts plastiques). Elle a lancé le projet de «Veilhan Versailles» (350 000 €). Ce Carrosse furieusement violet mixte les références, de la fuite à Varenne au découpage photographique du mouvement par Marey ou Muybridge, des pixels (littéralement «picture element») passés à la 3e dimension, à l'image furtive de l'écran. «De loin, on le perçoit comme un logotype. Plus on s'approche, plus il se décompose, comme la chair se décompose en cellules sous la peau», dit l'artiste.
Re: Art contemporain à Versailles !
Rien que ça, ce n'est qu'une modélisation, c'est absolument génial !
Re: Art contemporain à Versailles !
Mouais.
Les quelques photos que j'ai vues me laissent penser que Jeff Koons, c'était vachement plus tripant ! Bon, j'ai pas vu Jeff Koons non plus...
Les quelques photos que j'ai vues me laissent penser que Jeff Koons, c'était vachement plus tripant ! Bon, j'ai pas vu Jeff Koons non plus...
Rafaella- Messages : 1775
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Re: Art contemporain à Versailles !
Dans le genre art contemporain , il existe ça maintenant , à pas cher :
Zac- Administrateur
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Re: Art contemporain à Versailles !
Des cocottes en papier posées sur le sol et photographiées avec un grand angle ?Mrs Dalloway a écrit:
Rien que ça, ce n'est qu'une modélisation, c'est absolument génial !
Invité- Invité
Zac- Administrateur
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